Comment se fait-il que j'aie toujours l'impression qu'il est impossible d'écrire sur un artiste que je connais peu? Quel est l'angle d'approche qui me permettrait d'en parler (même) dans ces circonstances? On a souvent l'impression que les articles de musique sont écrits par des gens de l'entourage du groupe, tellement il y a de détails. Ces détails concernent généralement le contexte de formation et d'émergence du groupe, ou encore le moment où l'artiste solo s'est engagé sur le chemin de la création.
Voici un exemple au hasard. Je commence à écrire ce texte le soir du 6 mai. Le matin du 7 mai, je trouve sur Pitchfork la critique du dernier disque de Akron/Family. En voici la première phrase: "Like Parliament or Red Krayola before them, Akron/Family's career path is so varied and unexpected it's silly to expect their albums to represent growth or progression."
Je me demande en fait s'il faut être (ou se mettre en position d') un fan de la première heure pour pouvoir parler intelligemment d'une oeuvre. Je viens d'écouter I Can Wonder What You Did With Your Day, Xième album de Julie Doiron (ex-Eric's Trip). C'est la première fois que j'ai l'occasion et l'envie d'écouter un disque de cette artiste. Suis-je un cancre, en retard dans les nouvelles? Devrais-je garder le silence, écouter toute sa discographie et celles de ses collaborateurs, avant de m'exprimer sur le sujet?
Plus essentiellement, je crois que je suis en train de me demander: "Est-ce que tout est dans le contexte?" Et "Est-ce que le contexte est forcément celui du créateur?" J'ai pris une habitude mentale, je crois, qui est celle de comprendre les productions musicales populaires (les disques) dans leur ordre de parution, en tentant de me mettre dans la peau de l'artiste, en essayant de comprendre ce à quoi il aspire par sa création, où il en est rendu dans sa démarche.
Je pense qu'il est temps de me remettre un peu plus à ma place, c'est-à-dire celle de l'auditeur. Celui qui connaît mieux Autechre, Neutral Milk Hotel et Karkwa que les Beatles, Aznavour, Brel ou Dylan. Celui qui est rendu là, et qui a encore tout ça à découvrir - ou pas.
Je passe mes journées à faire découvrir des artistes aux gens. Ces derniers temps, j'arrive à faire découvrir Nick Drake à des baby-boomers. Et forcément, ils commencent par le dernier album, le meilleur, 37 ans après sa parution. Ces gens n'ont aucune idée du contexte de l'époque, ne savent pas que le gars a fait 2 autres disques et qu'il est mort peu de temps après avoir enregistré celui-ci. Ils écoutent, ils aiment et ils achètent. Ils emmènent le disque chez eux, et ils trippent.
Voilà à quoi ressemble l'expérience musicale réelle, telle qu'elle se vit au quotidien. J'aimerais m'en rapprocher. Passer moins de temps à comprendre l'artiste et sa démarche, pour m'intéresser davantage à ce qui se passe de mon côté. De toute façon, il n'y a que mon expérience que je puisse observer avec une certaine acuité.
jeudi 7 mai 2009
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